La collection Philippe Matheron

L’œuvre d’un paléontologue précurseur

Affiche de l’exposition "Philippe Matheron, 60 ans de géologie provençale" de 1983, Muséum de Marseille.
Affiche de l’exposition "Philippe Matheron, 60 ans de géologie provençale" de 1983, Muséum de Marseille.

Né à Marseille en 1807, Pierre-Émile-Philippe Matheron s’impose dès le milieu du XIXe siècle comme l’une des grandes figures de la géologie et de la paléontologie françaises. Ingénieur de formation, il est nommé agent-voyer en chef du département des Bouches-du-Rhône et participe à de nombreux travaux d’aménagement du territoire. À ce titre, il est détaché sur les chantiers du percement du tunnel de la Nerthe, ouvrage décisif pour l’extension du réseau ferroviaire vers Marseille, en lien avec la future gare Saint-Charles. Ces missions techniques lui offrent l’occasion d’observations scientifiques majeures, qui vont nourrir toute sa carrière.

Passionné de sciences naturelles, Philippe Matheron s’illustre tout particulièrement dans le domaine de la paléontologie des invertébrés. Ses travaux en systématique jettent les bases d’une stratigraphie rigoureuse appliquée au territoire provençal. Il contribue ainsi de manière décisive à la compréhension de l’histoire géologique de la région, mais aussi à celle d’autres territoires, notamment le bassin aquitain, en particulier le Médoc et les environs de Blaye, en Gironde.

Matheron, père de la la géologie provençale

À partir de 1844, alors qu’il suit les travaux de la ligne de chemin de fer vers Marseille, il rapporte la découverte, lors du percement du tunnel de la Nerthe, de fossiles remarquables : des dents et des ossements appartenant à une espèce alors inconnue de dinosaure. Ce n’est qu’en 1869 qu’il publiera sa description de cette espèce, proche de l’Iguanodon, qu’il baptise Rhabdodon priscus. Il identifie également, près de la gare de Rognac, des restes fossiles d’un autre grand reptile, qu’il associe à des fragments retrouvés précédemment par Doublier et Panescorese. Il en propose la définition d'un nouveau genre, Hypselosaurus. Enfin, ses fouilles sur le site de Velaux révèlent d’étranges formes sphériques ou ellipsoïdes, qu’il interprétera plus tard comme des œufs fossilisés, parmi les tout premiers jamais attribués à des dinosaures. Ces découvertes marquent le point de départ des recherches paléontologiques sur les œufs de dinosaures, un champ encore balbutiant à l’époque. Elles préfigurent l’importance mondiale que prendra, un siècle plus tard, le massif de la Sainte-Victoire, désormais reconnu comme l’un des gisements les plus riches et emblématiques au monde pour l’étude des pontes fossiles.

Vue de la Salle de Provence et de ses vitrines bijoutières historiques exposant une partie de la collection de Philippe Matheron. Muséum de Marseille.
Vue de la Salle de Provence et de ses vitrines bijoutières historiques exposant une partie de la collection de Philippe Matheron. Muséum de Marseille.

Une collection scientifique et patrimoniale exceptionnelle

À la fin de sa vie, Matheron laisse derrière lui une œuvre scientifique considérable, tant par ses publications que par sa collection. Après son décès en 1899, la Ville de Marseille rachète en 1902 à sa veuve l’ensemble de ses échantillons minéralogiques et paléontologiques pour la somme de 32 000 francs. Ce fonds exceptionnel, constitué de près de 40 000 spécimens représentant environ 7 000 espèces, est depuis conservé au Muséum d’histoire naturelle de Marseille, où il constitue l’un des piliers de la collection géologique.

L’importance de Matheron pour la science régionale est soulignée par Joseph Répelin, ancien conservateur de la section de géologie du Muséum, qui rédige un catalogue détaillé de la collection paléontologique de son prédécesseur. Il rend hommage à son apport fondamental en ces termes :

« L’œuvre de Matheron tient une place prépondérante dans la géologie de la Provence et, puisqu'on a donné au maître regretté le titre de père de la géologie provençale, nous tenons à dire que nous serons fiers d'être considérés comme ses enfants » (Répelin Joseph, 1898).

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